Article Le Pays du 24/03/2012 par J.G.
Neuf mois de prison ferme pour ce jeune conducteur héricourtois, qui avait pris le volant alors qu’il avait bu beaucoup d’alcool. Bilan : un piéton mortellement blessé à Sainte-Suzanne.
Le 6 février dernier, à Sainte-Suzanne, vers 20 h, Raoul Martinez, 71 ans, figure estimée de tous, traverse la route pour aller chercher deux pizzas, pour lui et son épouse Gisèle, chez le marchand installé place de l’Europe, en face de chez lui. Juste à ce moment-là, arrive une Polo VW qui se dirige vers Montbéliard. La route est sèche, l’endroit bien éclairé. Raoul Martinez finit de traverser et va rejoindre le trottoir opposé quand il est heurté de plein fouet par la petite voiture grise. Lorsqu’il retombe lourdement sur la chaussée, le piéton a quasiment cessé de vivre. Ce drame de la route laisse une famille éplorée. Le dossier a été évoqué hier devant le tribunal correctionnel de Montbéliard. À la barre, Romaric, 25 ans, domicilié à Héricourt. « Je ne l’ai pas vu », bredouille le prévenu, prostré. Il répète la phrase en boucle en réponse aux questions du président Alain Troilo, soucieux de savoir comment s’est produit ce tragique accident. Car ce qui est incompréhensible, c’est que le conducteur n’a pas vu le piéton qui venait de traverser devant lui et qu’il a fauché avec l’avant-droit de sa voiture. Roulait-il trop vite ? Oui, à en croire certains témoignages alors que d’autres affirment le contraire. Le vice-procureur Lionel Pascal a la réponse : « Si on n’a pas la preuve d’un excès de vitesse, on a au moins la certitude d’une vitesse excessive, comme en attestent les conséquences ».
Pour le reste, il partage pleinement l’analyse de MMe Fabienne Roma et Christine Vernerey, les avocates des parties civiles constituées par l’épouse et la fille de Raoul, ainsi que par la fille née d’une première union : si Romaric n’a pas vu le piéton, s’il n’a pas gardé la maîtrise de son véhicule, s’il a tué involontairement Raoul Martinez, c’est parce qu’il conduisait sous l’emprise de l’alcool ! Le dépistage effectué une heure après l’accident a révélé le taux de 1,53 g par litre de sang, soit trois fois le taux légal admis de 0,50 g/l. Le prévenu ne conteste pas avoir consommé de l’alcool mais semble minimiser la quantité : « Une cannette de bière de 50 cl, dans l’après-midi, avec un ami, et deux demis le long de la route, dans un bar, à Voujeaucourt ». Il dit être un buveur très occasionnel, qui « ne supporte pas bien l’alcool ». Mais sa vague explication du drame déplaît à la famille. « Ce que la famille voudrait entendre de sa bouche, c’est qu’il ne l’a pas vu parce qu’il avait bu de l’alcool », insistent les avocates. Le représentant du ministère public partage leurs doutes sur le côté occasionnel des libations de Romaric : « Les gendarmes ont noté l’absence des stigmates de l’alcool alors que le taux était très important : ça interroge », soutient le ministère public, convaincu que le jeune homme « a une problématique d’alcool ».
Il requiert deux ans de prison, dont un an assorti de sursis avec mise à l’épreuve et l’annulation du permis de conduire pendant un an. Me Jean-Baptiste Euvrard choisit une ligne de défense très sobre : « Il y a un choc, de l’alcool et un mort ! Que voulez-vous que je vous dise qui soit entendable ! Ce n’est pas possible de lui pardonner. C’est un homme avec ses faiblesses. Est-ce une raison pour le clouer au pilori ? », questionne l’avocat.
Le tribunal inflige à Romaric 18 mois de prison dont neuf avec sursis et mise à l’épreuve pendant trois ans. Son permis de conduire est annulé pour trois ans.